Birmanie, Malmawyine

Birmanie: un dernier petit tour et puis s’en va

Comme dit dans mon précédent article, mon premier constat dans cette ville fut qu’il n’y avait pas d’auberge de jeunesse.
Ce qui m’amène donc à mon second constat: qui dit pas d’auberge de jeunesse…. dit pas de jeunesse. Néanmoins, cela ne signifie en rien que je dois être condamnée à rester seule: s’il n’ y a personne de mon âge, qu’à cela ne tienne : je me rabattrai sur une autre génération et plus précisément sur deux autres personnages: Yvan et M. Antony, chacun âgés d’environ 70 ans.

Mon premier est Yvan.

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Yvan, prêt pour son cours.

Il travaille à ma guest-house, et en est même le maitre des lieux.
Lors de mon premier petit déjeuner à l’hôtel, j’avais remarqué ce petit papi à lunette pas très souriant et un peu sauvage. Il posait devant chaque pensionnaire un petit livret, dans la langue de chacun, sur les vertus de la méditation. Comme ça, sans un mot ni geste.
En voilà des manières. Trop d’interrogations trottaient dans ma tête, et très interressée par cette pratique, je m’élançais et lui demanda ce qu’il en était.
Il se trouve qu’Yvan est une sorte de « maître de méditation ». Très religieux et investi dans sa communauté (il a d’ailleurs ouvert et inauguré une sorte d’antenne de méditation Vipassana à Paris) il me proposa de me transmettre son savoir et de me confier « des secrets » birmans.
Ce fut comme ça que Yvan devint mon « Meditation Master »

A chaque rdv le rituel est le même: j’ai rendez vous sur la terrasse, ou Yvan m’attend. Sont prêts pour moi un carnet, un stylo et une tasse de thé.
Deux soirs consécutifs, je vais pouvoir poser toute mes questions sur le bouddhisme et la pratique de la méditation avant de recevoir ma séance guidée particulière: «Breaaaathe in, Breathe Out»
Il me transmet aussi des secrets du bouddhisme birman, dont notamment l’histoire de trois moines presque immortels ayant été aperçus il y a quelques années en train de voler. (Voler dans le ciel bien sur, pas braquer l’épicerie du coin)
C’est d’ailleurs à ce moment là que je réalise réellement le fossé entre nous: lorsqu’Yvan raconte cette histoire, il ne parle qu’à l’affirmative : «Ces moins ont volé de Yangon à Mandalay » (ce qui fait une petite trotte) D’ailleurs, il est parti en pèlerinage voir ces hommes qui vivent à présent retirés dans un temple dans la forêt, un endroit que seuls quelques élus connaissent.

Personnellement quand j’écoute et parle de cette histoire, c’est au conditionnel, et plus que ça même. Bien que je sois interressée par les préceptes du bouddhisme et son histoire, mon cerveau n’intègre pas vraiment, voir pas du tout les capacités de ces bonzes volants.
D’ailleurs, Yvan qui constate mon incrédulité est vexé, et clairement, il me fait passer le message: soit tu décides d’y croire et nous continuons d’en discuter, soit tu n’y crois pas du tout, et nous arrêtons tout ici. L’homme est très religieux, voir radical lorsqu’il m’explique que « ceux qui ne sont pas bouddhiste sont dans l‘erreur » … :
J’estime inutile de me lancer dans le débat, et continues d’écouter , apprendre ce que je peux apprendre avec lui, et ce fut malgré tout riche en instructions et discussions

Mon second est Mr Antony.

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M. Anthony maintenant, M. Anthony avant

Mon dernier jour sur Moulmein est finalement arrivé et il faut que je l’occupe, mon hôtel n’étant pas suffisamment sympa pour que j’y reste sans rien faire. A l’accueil je constate qu’ils proposent un tour organisé, sur « l’île des Ogres », une petite île réputée pour son panel d’activités artisanales. La visite est guidée par un certain M. Antony dont j’ai déjà entendu parler par d’autres voyageurs durant mon parcours.
Soyons fous, je réserve ma place : nous sommes trois dans la visite, une autrichienne et un américain. (ou était-ce une allemande et un anglais… ? bref, un détail) . Elle est censée durer une très grosse demi journée (ou petite journée), inclue le repas de midi et une baignade.

Comme convenu, M. Antony nous récupère le matin. Contrairement à Yvan, il est bavard, très avenant et se marre tout le temps. Je dirai même qu’il fait régulièrement des blagues qu’on ne comprend pas toujours, mais comme nous sommes polis, on rit.
Notre petite camionnette de visite s’élance, nous voilà parti pour l’île des Ogres, à une vingtaine de minutes de route d’ici .
Premier arrêt impromptu: une grande fête chez des gens. Cette famille célèbre le fait que ses trois fils deviennent moines (un passage « à durée limitée » obligatoire chez les bouddhiste, du moins en Birmanie. Et ça se fête)
Tout le village est invité, et un immense matériel sono qui crache est installé à l’extérieur de la maison, un peu comme pour prévenir les gens. M. Antony discute un peu avec la famille et nous voilà installés dans la maison (en vrai nous apprendrons qu’il leur a donné un petit billet de participation)
Voilà donc qu’on nous trimbale de pièce en pièce pour saluer des gens, nous gaver de thé et finalement, en bout de parcours, nous gaver de nourriture. Je l’ai déjà constaté ailleurs mais en Birmanie (comme dans beaucoup de pays en fait) les hôtes ont toujours peur que les invités meurent de faim. Du coup, dans le doute, ils nous engraissent comme des canards.

Il y a d’ailleurs une phrase fort utile que j’ai appris très vite : WOBBY DOBBY , que l’on pourrait littéralement (et élégamment) traduire par « STOP I M FULL / STOP JE SUIS PLEINE » (desuite en français ça ne sonne pas très classe hein….)

Nous repartons donc lestes comme des enclumes (et avec un petit cadeau des hôtes) de cet arrêt inattendu, avant de filer vers notre premier atelier.
Je ne me rappelle pas l’ordre chronologique des évènements, mais voici en vrac un listing des corps de métiers que l’on trouve sur l’île des ogres :
– Tressage de chapeaux traditionnels en feuilles séchés
– Tressage de paillassons
– Fabrication d’élastiques en gomme d’hévea
– Travail du bois: pipes, peignes et autres accessoires et mobiliers
– Fabrication de l’ardoise.
– Tissage
On trouve de tout ici, pire qu’Ikéa.
Bien que notre stop pour manger chez l’habitant ait été copieux, nous faisons également une pause déjeuner. Celle-ci est suivi d’un long break dans une improbable «piscine municipale» que nous partageons avec 2 adolescents du coin: un immense trou creusé dans le sol et bétonné, quelques draps en guise de cabine d’essayage et deux transats : il nous en faut pas plus pour être heureux (il fait environ 35 degré tout de même)
Mes deux compères d’aventure ne sont pas très drôles, et il en manquerait de peu que je m’ennui mortellement. HEUREUSEMENT, M. Antony est là avec son grand sourire et ses blagues, et je passerai la journée avec lui, à l’inonder de questions. Comme on dit en anglais, «he made my day» , et je suis d’ailleurs la seule à être repartie avec un petit souvenir de sa part.

C’est sur ce dernier visage et des adieux chaleureux de Antony et Yvan que s’achève mon séjour en Birmanie (ou devrais-je dire Myanmar), avant ma prochaine destination
Dans le trajet de bus qui m’amène jusqu’à la capitale et l’aéroport, je ferai une dernière rencontre: un jeune assis à côté de moi, Aung de son prénom, est enthousiaste d’avoir une étrangère avec lui. Nous discuterons tout le long du trajet, et lui et sa sœur m’offriront même le repas de midi.
Une dernière fois, l’accueil birman n’a pas failli à sa réputation.

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